Débriefing difficile : formation de formateurs en santé

Introduction

La simulation est devenue une méthode incontournable dans la formation des professionnels de santé. Elle permet de perfectionner les compétences cliniques dans un environnement contrôlé et sans risque pour les patients. Toutefois, l'une des étapes les plus délicates de la simulation reste le débriefing, moment clé où les participants analysent leur performance pour en tirer des leçons. Mais que se passe-t-il lorsque le débriefing devient difficile ? Les formateurs en simulation doivent alors être capables de gérer ces moments délicats pour garantir un apprentissage efficace. Oui, le débriefing est une étape pédagogique primordiale, mais il peut parfois être difficile à mener.

Le débriefing difficile survient dans plusieurs cas : des émotions fortes non contrôlées, des apprenants réticents, ou encore des problèmes liés à la dynamique de groupe. Dans le domaine de la santé, il est indispensable pour les formateurs de savoir naviguer dans ces eaux troubles pour assurer un environnement d'apprentissage sûr et productif. Cet article présente les principales stratégies à suivre pour structurer un débriefing et les outils nécessaires pour former les formateurs experts.

Débriefing et simulation : des concepts pédagogiques indissociables

Le débriefing fait partie intégrante de toute simulation. Il permet aux apprenants de réfléchir sur leur performance, d'identifier les erreurs et de les corriger. C'est une méthode essentielle pour aider les professionnels de santé à perfectionner leur pratique. Le débriefing occupe une place centrale dans l'apprentissage basé sur la simulation[1]. Pour certain, même, le scénario n’est qu’un prétexte au débriefing !

Les formateurs en simulation doivent non seulement être des experts dans leur domaine, mais aussi maîtriser les techniques de gestion des émotions et des tensions pouvant survenir lors d'un débriefing. Dans un débriefing difficile, la capacité à gérer ces situations avec tact et empathie devient primordiale.

Pourquoi les débriefings deviennent-ils difficiles ?

Plusieurs facteurs peuvent rendre un débriefing difficile[2]. Ces facteurs peuvent être liés aux apprenants, bien sûr, mais le plus souvent, la responsabilité incombe aux formateurs : choix ou difficulté du scénario inadapté aux apprenants, prébriefing trop rapide, présentation du mannequin incomplète, etc.

Dans ces conditions, les apprenants se réfugient derrière des comportements qui ne sont que des réactions de défense dans un contexte de stress intense généré par une mise en péril de leur image sociale dans le groupe de soignants.

1. Les apprenants émotionnels : La simulation, surtout lorsqu'elle simule des situations de stress élevé, peut susciter des réactions émotionnelles fortes chez les participants. Ces émotions peuvent interférer avec le processus de réflexion pendant le débriefing.
2. Le manque d'engagement : Certains apprenants peuvent être réticents à participer activement au débriefing, soit par peur de l'échec, soit par manque de confiance en eux.
3. Les apprenants dominateurs : Parfois, un participant peut monopoliser la conversation, ce qui empêche les autres de s'exprimer.

Ces situations compliquent le travail du formateur. Pourtant, une gestion adéquate de ces situations permet de maintenir un environnement d'apprentissage sain et constructif.

Comment prévenir un débriefing difficile ?

Voici les principaux outils permettant de prévenir un débriefing difficile :

1. Le briefing avant la simulation

La préparation est la clé pour éviter bon nombre de difficultés. Un briefing bien structuré avant la simulation permet de définir les attentes et d'établir un cadre pédagogique basé sur un respect mutuel. Ce briefing, souvent appelé "prébriefing", réduit les risques de malentendus et de réactions négatives lors du débriefing. Selon [1], ce prébriefing permet de réduire les risques de difficulté en définissant clairement les objectifs pédagogiques et en fixant des attentes réalistes. Pour ne rien oublier, il faut se rappeler les « 3S »[3]

- Simulation : qu’est-ce que la simulation ? Comment va se dérouler la journée ?

- Simulateur : présentation du mannequin (briefing technique) et présentation de la salle de simulation

- Scénario : définition du contexte clinique et de la situation, participants.

2. Créer un environnement sûr

L’un des principes essentiels dans le débriefing est de garantir que les apprenants se sentent en sécurité pour s’exprimer librement. Un environnement psychologiquement sûr est un facteur crucial dans l’efficacité du débriefing. Un environnement sécurisé favorise la gestion des situations difficiles et aide les apprenants à être plus ouverts aux critiques constructives².

3. Gérer les émotions

Lors d’un débriefing difficile, les émotions peuvent facilement prendre le dessus. Les formateurs experts doivent être en mesure de reconnaître et de gérer ces émotions de manière professionnelle. Le fait de normaliser les réactions émitionnelles peut aider à désamorcer les tensions. Comme le rapporte Grant, la reconnaissance et la validation des émotions lors de la première phase du debriefing permettent de remettre l'accent sur les objectifs pédagogiques et de maintenir le débriefing « sur les rails ». Il est important de faire comprendre aux soignants que l’expression de ces émotions, rarement possible dans les soins du quotidien (par manque de temps, pudeur, etc.) est possible et même favoriser en simulation. Elle permet d’en parler en équipe et de ne pas en faire un tabou !

Outils réactifs pour les situations difficiles

Lorsque la situation devient vraiment tendue, certains outils réactifs peuvent être déployés pour gérer un débriefing difficile. L’objectif est alors de ne pas laisser l’interaction dégénérer et de remettre les participants dans une dynamique d’apprentissage positive. Voici quelques-unes de ces stratégies en fonction du profil des apprenants :

-       Apprenant silencieux : affirmer que son ressenti peut être utile à l’ensemble du groupe, importance du travail d’équipe, valorisation du « oser dire » et de l’expression des émotions, dépister un mal-être important et savoir prendre l’apprenant « à part » si besoin.

-       Apprenant joueur et peu investi : il cache peut-être une peur du jugement... Réaffirmer à la fois le contrat pédagogique et de fiction (on s’engage dans la formation) et les limites du réalisme du mannequin parfois. Ne pas le laisser compromettre l’apprentissage du groupe !

-       Apprenant qui « sait tout » : être factuel, se référer aux recommandations professionnelles et recommandations d’experts. Obtenir l’avis des pairs. Savoir (parfois) ne pas aller au conflit si l’apprentissage du reste du groupe n’est pas compromis.

-       Apprenant accusateur : rappeler les règles et contrat de formation : respect, confiance, curiosité, etc. Se focaliser sur la performance d’équipe et pas sur l’individu. Attention : aucune tolérance pour les commentaires désobligeants et les offenses personnelles !

-       Apprenant coupable : explorer les raisons du mécontentement, valoriser les points positifs, rechercher un feed back positif des pairs, savoir s’excuser en tant que formateur si le scénario était trop complexe.

-       Apprenant en pleurs : proposer de reprendre ses esprits (avec un autre formateur) pour rejoindre le groupe dès que possible pour éviter l’isolement. Valoriser le travail d’équipe. Envisager aussi que le scénario ait pu être trop difficile et dans ce cas s’excuser !

-       Apprenant défensif : valider les limites de la simulation mais réaffirmer le contrat pédagogique et de fiction. Privilégier l’apprentissage du groupe à celui de cet apprenant.

 

Techniques de communication spécifiques

Il existe plusieurs techniques de communication qui peuvent aider à désamorcer les tensions.

Ces techniques comprennent :

-       la validation des émotions des participants,

-       la paraphrase pour reformuler les idées et vérifier la compréhension,

-       la normalisation pour aider à mettre les émotions en perspective. Par exemple, un formateur peut dire : "Je comprends que cette situation soit difficile, mais c'est une réaction normale dans un contexte de stress élevé". Ce genre de remarques aide à créer un espace de dialogue constructif.

Ne pas oublier que savoir débriefer c’est avant tout savoir questionner et que le formateur est un catalyseur de la réflexion collective et pas un « sachant » faisant un cours !

Le rôle du formateur en simulation dans le domaine de la santé

Les formateurs en simulation dans le domaine de la santé doivent posséder un ensemble de compétences très spécifique. Ils doivent non seulement être experts dans leur domaine médical, mais aussi savoir comment animer et structurer des sessions pédagogiques qui maximisent l’apprentissage.

L’approche préventive des difficultés de débriefing est fondamentale. La gestion des émotions et des tensions pendant le débriefing fait partie du rôle des formateurs. Ceux-ci doivent également suivre une formation continue pour s'assurer qu'ils restent à jour avec les dernières techniques pédagogiques.

Formation et compétences des formateurs en simulation

De nombreux centres de simulation offrent des diplômes universitaires ou des certifications pour les formateurs en simulation. Ces programmes incluent une formation approfondie sur les techniques de débriefing et la gestion des situations difficiles. Selon Grant et al., l'enseignement basé sur la simulation doit inclure des modules spécifiques sur le débriefing, en particulier sur la gestion des situations émotionnelles complexes.

Conclusion : Comment perfectionner l’art du débriefing difficile ?

Gérer un débriefing difficile dans le cadre d'une simulation médicale demande une grande maîtrise des outils pédagogiques et une compréhension profonde des dynamiques de groupe. Les formateurs en simulation doivent être bien formés et capables de s'adapter aux différentes situations qui peuvent surgir au cours du débriefing. Il est essentiel de structurer le débriefing pour atteindre les objectifs pédagogiques, tout en maintenant un environnement d'apprentissage sûr et respectueux.

 

Tableau récapitulatif des stratégies pour gérer un débriefing difficile

 

Stratégie	Description	Exemple
Prébriefing	Fixer les attentes avant la simulation pour éviter des incompréhensions	Clarification des objectifs, rappel du respect mutuel
Validation des émotions	Reconnaître les émotions des participants pour désamorcer la tension	"Je comprends que ce soit difficile, mais c'est une réaction normale"
Environnement sécurisé	Créer un espace où les participants se sentent libres de s’exprimer	Positionner les sièges en cercle pour réduire le gradient hiérarchique entre formateurs et apprenants
Suivi post-débriefing	Offrir un suivi personnalisé aux apprenants qui ont rencontré des difficultés	Prévoir une réunion de suivi pour discuter des sentiments résiduels ou proposer de passer de nouveau en simulation après avoir fait le point sur les compétences requises

 

Pour aller plus loin

 

Pour ceux qui souhaitent approfondir leurs compétences en gestion de débriefing difficile, la formation proposée par Emergensim est idéale.

 

 Elle s'adresse aux formateurs qui souhaitent perfectionner leurs pratiques dans le domaine de la santé, avec un accent particulier sur les situations complexes rencontrées lors des débriefings.

 

Cette formation permet d'acquérir des outils pédagogiques adaptés, tout en garantissant un environnement d'apprentissage sécurisé et productif.

 

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter : Emergensim - Formation de formateurs au débriefing difficile.

 

Sources :